Comment contrôler les risques de transmission de la COVID 19 dans les lieux de travail?

Depuis quelques semaines, le Québec prépare le retour au travail ainsi que le déconfinement progressif afin d’assurer une reprise économique, mais puisque les lieux de travail sont des endroits qui peuvent contribuer à la transmission de la COVID‑19 [1], les employeurs ont le devoir de mettre en place des mesures sanitaires appropriées au sein de leurs organisations afin de prévenir et contrôler la propagation de ce virus. Ces mesures englobent également la formation des employés afin que ceux-ci aient les connaissances nécessaires pour effectuer leur travail en toute sécurité. [2]

Il est à noter que tout employé est en droit de dénoncer son employeur à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail si ce dernier considère que son employeur n’a pas implanté des mesures raisonnables dans les circonstances. En effet, l’article 51 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) décrit que l’employeur a l’obligation de prendre « les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique du travailleur ».

Certaines autorités gouvernementales et associations ont développé des outils pour guider les employeurs dans l’élaboration des mesures préventives au sein de leur entreprise.

1. Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST)

Afin de planifier les mesures qui permettront à une entreprise de continuer à fournir ses principaux produits ou services, le CCHST a préparé un guide dans le cadre de l’élaboration par un employeur d’un plan de continuité des opérations en cas de maladies infectieuses. Pour le document complet, vous pouvez visiter le site.

En résumé, le CCHST conseille en premier lieu à un employeur d’évaluer les éléments essentiels au bon fonctionnement de son entreprise, ainsi que l’impact sur ses activités en cas de privation de ceux-ci. Il est clair que l’employeur doit également se préparer à un nombre d’absences plus élevé de la part des employés.

De plus, le CCHST recommande de suivre les étapes suivantes afin de mettre en œuvre un protocole de retour au travail efficace [3]:

  • Élaborer une politique clairement définie et documentée
  • Élaborer un plan d’intervention
  • Mettre le plan en œuvre
  • Essayer le plan auprès des employés, le tenir à jour ainsi que vérifier son efficacité

Voici quelques pistes de solutions [4]:

  • Explorer la flexibilité du travail : télétravail et horaires flexibles
  • Mesures de dotation de personnel : vidéoconférences, distanciation entre les clients et les employés, réduire le nombre de personnes dans les locaux par rotation
  • Transport : examiner les possibilités de covoiturage ou de chauffeur d’autobus privé pour les employés qui utilisent quotidiennement les transports en commun

2. Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST)

La CNESST, quant à elle, a mis en place un guide de normes sanitaires en milieu de travail afin de renseigner les employeurs pour la prise en charge de la santé et de la sécurité dans un contexte de COVID-19. Pour plus d’information, veuillez télécharger le guide PDF.

En bref, les stratégies d’atténuation des risques que l’employeur doit garder en tête sont les suivantes [5]:

  • Exclusion des personnes symptomatiques des lieux de travail
  • Distanciation physique
  • Lavage des mains
  • Étiquette respiratoire
  • Maintien de mesures d’hygiène avec les outils, les équipements et les surfaces fréquemment touchés

Néanmoins, ces stratégies doivent être utilisées en combinaison pour être efficaces.

La CNESST offre également une trousse d’outils COVID-19 disponible sur son site Internet (aide-mémoires, listes, affiches et autres) pour permettre la mise en œuvre d’un protocole.

3. L’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail, secteur « affaires municipales » (APSAM)

L’APSAM précise que la meilleure protection reste à ce jour le télétravail. Toutefois, lorsque cette solution ne peut être appliquée, l’APSAM partage d’autres mesures pour maîtriser l’exposition à la COVID‑19. Pour avoir accès aux exemples ainsi qu’à l’ordre d’efficacité de ces mesures, veuillez visiter le site.

Recommandations et communication du protocole

Le protocole présenté aux employés devrait en général inclure les mesures suivantes [6] :

  • Procéder à une inspection des lieux de travail avant le retour au travail
  • Évaluer les méthodes de précautions pour confirmer que ces dernières respectent les lignes directrices émises par le gouvernement
  • Soumettre un formulaire d’auto-évaluation quotidienne à tous les employés avant de se rendre au travail et implanter une procédure d’isolement pour ceux qui présentent des symptômes
  • Informer les employés et les clients à l’aide de communiqués et d’affiches des lignes directrices relatives à la distanciation physique pour limiter les contacts interpersonnels
  • Installer des affiches aux endroits clés des lieux de travail pour les mesures d’hygiène et s’assurer que tous les produits désinfectants nécessaires au nettoyage des mains et des surfaces fréquemment touchées sont disponibles à chacun des employés
  • Informer les employés relativement aux rassemblements de masse afin de réduire le plus possible les rencontres en personnes et opter pour des visioconférences
  • Mettre en place des solutions de barrières physiques lorsque possible et si nécessaire
  • Mettre en place un mécanisme connu de tous pour recevoir les signalements de toute situation dangereuse et les commentaires de chacun

Lorsque le protocole est finalisé, l’employeur devrait communiquer par courriel le protocole à tous les employés ainsi que les aviser de ses intentions de réouverture. Il pourrait également être approprié d’afficher ce protocole sur les lieux de travail à titre de rappel.

Finalement, il est recommandé de procéder à une rencontre avec tous les employés (en personne en appliquant les mesures de distanciation ou par visioconférences) pour expliquer le protocole ainsi que répondre aux questions et mentionner les points suivants [7] :

  • Rappeler l’engagement de sécurité de l’employeur
  • Partager les attentes et les objectifs à l’égard des employés
  • Informer les employés des risques
  • Faire un rappel de vigilance pour ceux qui peuvent développer des symptômes ou avoir été en contact avec le virus
  • Encourager les employés à rapporter toute situation dangereuse dont ils ont connaissance

Tout changement ou mise à jour du protocole devrait être transmis selon les règles détaillées précédemment.

Refus de se présenter au travail

Aux termes de la loi, un employé peut refuser de se rendre sur les lieux de travail s’il y a « un motif raisonnable de croire que l’exécution du travail va faire en sorte qu’il s’expose à un danger pour sa santé, sa sécurité, son intégrité physique » [8].

Toutefois, ce droit n’est pas automatique et l’employé doit présenter un état de santé problématique pour refuser le retour au travail. [9]

La CNESST précise sur son site Internet les règles relativement au droit de refus ainsi que sur les recours applicables en cas de désaccord entre l’employé et l’employeur sur le sujet.

Télétravail : effets bénéfiques et néfastes

Alors que plusieurs entreprises choisissent de poursuivre le télétravail puisqu’elles demeurent tout de même pleinement opérationnelles de cette manière, il ne faut pas négliger les risques et impacts psychosociaux face à cette solution. L’isolement physique est un enjeu tout aussi important à considérer par l’employeur dans la mise en place de son protocole.

L’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) offre des pistes de solutions pour le télétravail efficace afin d’éviter d’engendrer des effets néfastes sur la santé psychologique des employés.

Autrement dit, la mise en place d’un protocole de contrôle du COVID-19 par les entreprises est plus que nécessaire et doit être évaluée plus tôt que tard, même si la phase de rétablissement ne commence pas immédiatement.

Les experts affirment d’ailleurs que la pandémie pourrait frapper en plusieurs vagues et que celles‑ci dureraient généralement trois à neuf mois [10]. Il est donc nécessaire pour l’employeur de retenir des solutions souples et de se questionner sur les divers scénarios de la COVID-19 pour corriger les mesures sanitaires dans le cadre de ses activités habituelles, nouvelles et ponctuelles.

Par Mance Ménard St-Pierre


[1] https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies/2019-nouveau-coronavirus/document-orientation/prise-decisions-fondees-risques-lieux-travail-entreprises-pandemie-covid-19.html

[2] https://www.cnesst.gouv.qc.ca/salle-de-presse/covid-19/Documents/DC100-2146-Guide-Prevention-Covid19.pdf

[3] https://www.cchst.ca/products/publications/busn_cont/

[4] Voir note 3

[5] Voir note 2

[6] https://www.santepubliqueottawa.ca/fr/public-health-topics/covid-19-information-for-workplaces.aspx

[7] https://www.cnesst.gouv.qc.ca/Publications/100/Documents/DC100-2146Bweb.pdf

[8] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1698660/reouverture-economie-quebec-demandes-refus-travail-dangereux-employes-cnesst-covid-10

[9] Voir note 8

[10] Voir note 3

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