La société en commandite au Québec : un outil juridique et fiscal avantageux

La société en commandite : un outil juridique et fiscal avantageux.

La société en commandite (la « SEC ») est une forme de société de personnes qui offre une structure hybride intéressante, tant sur le plan juridique que fiscal. Elle est souvent choisie pour des projets d’envergure, notamment en immobilier ou dans le cadre de partenariats d’investissement.

Quelles sont les particularités d’une société en commandite ?

La SEC est une société de personnes au sens du Code civil du Québec. Contrairement à la société par actions, elle ne possède pas de personnalité juridique distincte. Toutefois, la doctrine et la jurisprudence reconnaissent qu’elle dispose d’un patrimoine distinct de celui de ses membres, ce qui permet de limiter la responsabilité des commanditaires.

Elle se distingue par la dualité de ses associés :

  • Les commandités : ce sont les gestionnaires de la SEC. Ils ont le pouvoir de l’administrer et de l’engager. Le fait que la SEC ait un patrimoine distinct signifie que les créanciers de la SEC doivent d’abord se tourner vers ce patrimoine pour le paiement des dettes. Ce n’est qu’en cas d’insuffisance de ce patrimoine que les commandités peuvent être tenus personnellement responsables, et ce, de manière solidaire. Ils sont donc responsables solidairement des dettes de la société en cas d’insuffisance de son patrimoine. Il doit minimalement y avoir un commandité pour valablement constituer une SEC et il n’y a aucune exigence d’en avoir une pluralité.
  • Les commanditaires : ils contribuent financièrement au fonds commun de la SEC, mais ne participent pas à la gestion. Leur responsabilité est limitée à leur apport convenu. Leur responsabilité limitée constitue un avantage notable. Toutefois, cette limitation n’est pas absolue : si un commanditaire participe à la gestion de la SEC ou agit publiquement comme s’il était un commandité, il risque de perdre le bénéfice de cette protection et de devenir personnellement responsable envers les tiers. Il est donc essentiel que les commanditaires respectent leur rôle d’investisseur passif et consultatif pour préserver leur responsabilité limitée. Nous traiterons de ce sujet plus en profondeur lors de notre prochain article.

Comment est-elle formée ?

La SEC est créée par un contrat de société conclu entre les commandités et les commanditaires. Ce contrat doit être mis par écrit et contenir les principales règles de fonctionnement, incluant les apports de chacun, les modalités de répartition des profits et des pertes, et les pouvoirs et responsabilités respectifs des parties.

La SEC doit également être immatriculée au Registraire des entreprises du Québec. Elle est assujettie aux dispositions générales du Code civil du Québec sur les sociétés ainsi qu’aux articles spécifiques à la société en commandite.

Qu’est-ce qui la rend plus avantageuse dans certains cas ?

Plusieurs éléments rendent la SEC attrayante :

  • Responsabilité limitée : les commanditaires bénéficient d’une responsabilité limitée, similaire à celle des actionnaires d’une société par actions.
  • Souplesse administrative : la SEC est généralement moins complexe à gérer qu’une société par actions.
  • Avantages fiscaux : sur le plan fiscal, la SEC n’est pas considérée comme une « personne ». Ainsi, la société de personne n’a pas l’obligation de produire une déclaration de revenu. Les profits ou pertes sont directement attribués aux associés, ce qui permet une certaine optimisation fiscale, notamment en matière de déduction de pertes.
  • Instrument de financement : elle est particulièrement prisée pour des projets immobiliers ou d’infrastructure, permettant aux commanditaires d’investir sans prendre part à la gestion et en limitant leur exposition aux risques.

En somme, la SEC constitue un véhicule juridique efficace et flexible, idéal pour des partenariats où certains membres souhaitent investir sans s’impliquer activement dans la gestion. Toutefois, sa mise en place nécessite une analyse précise des objectifs des parties et un encadrement juridique rigoureux.

1 Code civil du Québec, RLRQ c CCQ-1991[C.c.Q.].

2 Laval (Ville de) c. Polyclinique médicale Fabreville, s.e.c. 2007 QCCA 426; Bernard c. Leprechaun, s.e.c., 2012 QCCS 5186; Bernard LAROCHELLE et Charlaine BOUCHARD, Contrat de société et d’association, 3e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2012, p. 21.

3 C.c.Q., supra, note 1, art. 2236.

4 Ibid, art. 2246.

5 Ibid, art 1830 et ss; art 1871 à 1888.

6 Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e suppl), art. 248(1) « personne ».

7 Jean Potvin, « Fiscalité des sociétés de personnes », dans Association de planification fiscale et financière, Congrès 1992, Montréal, p. 423, aux pages 426 et 427.

Par Me Roxanne Dupuis

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