Garanties du bailleur en cas de faillite du locataire : Partie 1 – L’hypothèque
Lors de la conclusion d’un bail commercial, il est d’usage qu’un bailleur requiert certaines garanties de la part de son locataire afin de se protéger en cas d’inexécution de ce dernier. Ces garanties peuvent entre autres prendre la forme d’une hypothèque, d’un dépôt de sécurité, d’une lettre de crédit ou d’un cautionnement. Toutefois, qu’advient-il de ces garanties lorsque le locataire fait faillite?
Nous sommes heureux de vous présenter une série de trois articles qui présenteront chacun le traitement réservé à une garantie octroyée au bailleur par le locataire, lorsque ce dernier fait faillite.
Quand cela se produit, cela change de façon considérable la façon dont les garanties prises par le bailleur peuvent être exercées. En effet, la Loi sur la faillite et l’insolvabilité 1 (« LFI ») a maintenant préséance, et celle-ci prévoit des mécanismes particuliers.
Partie 1 – L’hypothèque
Il est assez fréquent qu’un bailleur, lorsqu’il consent un bail à un locataire, veuille se prendre une garantie sur les biens de ce dernier pour se protéger en cas de non-paiement du loyer ou de non-exécution de toute autre obligation. Ainsi, il est commun de retrouver dans un bail commercial une hypothèque, dans la très grande majorité des cas une hypothèque mobilière, sur certains biens du locataire. Le cas d’espèce courant est une hypothèque sur les biens qui se trouvent dans le local. La logique derrière cette garantie est que si le locataire fait défaut de payer, le bailleur peut demander ou exiger la résiliation du bail (selon les termes de celui-ci), et exercer un recours hypothécaire sur les biens dans le local pour couvrir sa créance.
Toutefois, dans un cas de faillite, il faut prendre en considération la Loi sur la faillite et l’insolvabilité 2 (« LFI »), laquelle a préséance vu la compétence fédérale en matière de faillite 3.
Dans ce cas, si le locataire avait consenti une hypothèque pour garantir les obligations du bail, le bailleur ne peut s’en prévaloir en cas de faillite. En effet, le bailleur est déjà colloqué comme créancier prioritaire selon l’article 136(1)f) de la LFI. Le fait de lui conférer le titre de créancier garanti en vertu de son hypothèque viendrait contrecarrer la priorité déjà prévue à la LFI; or, c’est la LFI qui doit avoir préséance en cas de faillite 4.
Ainsi, il détient une créance prioritaire pour un montant équivalent à trois (3) mois de loyer précédant la faillite. De plus, si le bail prévoit un loyer exigible par anticipation en cas de faillite, le bailleur dispose d’une créance prioritaire pour un montant équivalent à trois (3) mois supplémentaires de loyer. Toutefois, le montant total dont le bailleur peut se prévaloir en vertu de cette créance prioritaire « ne peut dépasser la somme réalisée sur les biens se trouvant sur les lieux sous bail ».
L’hypothèque demeure une garantie intéressante, mais son application est limitée, même annihilée, lorsque le locataire se prévaut des protections de la LFI. De plus, même lorsque le locataire n’est pas en faillite, l’exercice des droits reliés à l’hypothèque demande certaines démarches (envoi d’un préavis d’exercice d’un droit hypothécaire, demande au tribunal pour ordonner le délaissement, vente des biens, etc.), que d’autres types de garanties ne demandent pas.
Pour plus de détails sur ces autres garanties, restez à l’affût de nos prochains articles de cette série sur les garanties du bailleur en cas de faillite du locataire!
Dans l’intervalle et comme toujours, n’hésitez pas à contacter un membre de l’équipe de droit immobilier de Gascon & Associés pour toute question à ce sujet.
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1L.R.C. (1985), c. B-3.
2L.R.C. (1985), c. B-3.
3 Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Victoria, ch. 3 (R.-U.), par. 91(21).
4Restaurant Ocean Drive inc. c. Sam Levy & associés inc., 1997 CanLII 10235 (C.A.).
5Sec. 136(1)(f) BIA.